Eric Reinhardt est un auteur français né en 1965 ; il a écrit sept romans : Le Système Victoria, son premier livre, fut immédiatement encensé par la « presse branchée » ainsi que par la plupart de ceux qui suivirent. Il est vrai que cet écrivain, qui s’est mis relativement tardivement à l’écriture après un passage en classe préparatoire HEC, plait énormément dans les milieux bobo parisien et middle class intello, de par sa vision des choses et de son art, l’écriture, très méta textuelle et à la fois originale.

Une vision cérébrale, sans être jamais farfelue, qui ne se prive pas de traits d’humour et où l’action est essentiellement concentrée à Paris. Citadin, caustique, parfois « déconnecté », son héros écrivain voue un culte à l’automne et aux influences quasi mystiques qu’exerce cette saison sur l’inspiration.

Un univers particulier

La vie, la quête d’un idéal, l’amour, la primauté des expériences et des sensations en font partie et il faut dire qu’Eric Reinhardt s’est réellement créé un style, une manière de peindre l’introspection bien à lui : les souvenirs sont alors retranscrits sous forme d’impressions, traduites par un langage précis, varié, qui frise par moments le trop-plein technique. Un « schéma langagier des sentiments » en somme qui intervient dans la construction de ses personnages et de son propre personnage narrateur, influencé par sa propre expérience.

Ses grands succès sont à ce jour les romans Le Moral des Ménages et Cendrillon, respectivement parus en 2001 et 2007, où le lecteur constate la récidive de plusieurs leitmotiv : critique de la petite-bourgeoise complexée, dérives capitalistes, humiliations, philosophie de l’instant, mentors, angoisses, transcendance.

Zoom sur un roman

La phrase à rallonge et l’art des circonlocutions sont les premières cartes à jouer de Reinhardt ; les critiques en effet lui font en premier lieu le reproche d’être un auteur « bavard ». Son quatrième roman, Cendrillon (Editions Stock), s’est vu récompensé de trois T chez Télérama et qualifié de roman « mille feuille » ou encore « une tentative d’embrasser le monde tel qu’il va ». Les histoires de divers personnages qui ont chacun leurs névroses et leurs qualités, leurs fiertés et leurs obsessions, dont le narrateur fait partie active, s’entrecroisent.
Puis on se rend compte à la lecture qu’il s’agit d’avatars de l’auteur lui-même, incarnant différentes couches de sa personnalité et périodes de sa vie : enfance, adolescence, rencontres, muses, métamorphose, quête. Le lecteur recompose ces portraits au fil du texte tout en composant avec la vie intérieure du narrateur, aspirations d’écrivain, doutes, extases.

Une citation

« Je voudrais parler de l’écriture comme d’une activité éminemment vivante, diabolique, liée à la chair, aux nerfs, aux corps, au sexe, au sang, aux organes, aux humeurs, à la mémoire, aux maladies diverses qui nous élisent, nerveuses, utiles, voulues, physiologiques, philosophiques, inopportunes, imaginaires. Une activité dont le temps constitutif, comme celui des organes, est le présent. Parlant des livres que j’ai écrits, je ne parlerai de rien d’autres que de crises, de pulsions, d’urgences, d’accouplements, d’explosions, de corps, d’embardées, de sécrétions, d’empoisonnement, de désespoir. Je n’appartiens pas à cette catégorie de gens de lettres dont l’aplomb est comparable à celui des notaires, et qui vivent l’écriture comme une fonction sociale (…) Je n’écris pas comme on compose politiquement un discours d’investiture, ni pour que se clarifie ma dignité d’être humain. (…) Il s’agit de désordre, de vices, de perversité, d’urgence, de folie. »

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